L'enquete ...


Avant le crime, les vacances des Drummond :

Les Drummond sont déjà venus en vacances en France et plus particulièrement dans le sud de la France. Ils vivent dans une grand manoir de deux étages «  Spencer House » qui se trouve à Nuthall, dans la banlieue de Nottingham. Cette vaste demeure, que la famille occupa de 1945 à 1952, est aujourd'hui le siège d'une entreprise qui s'occupe du  Festival-Opera de Nottingham.

Les vacances d'été 1952, les Drummond choisissent de les passer en France, en compagnie de leurs amis :la famille Marrian qui habite Edimbourg en écosse. Mr Marrian était un ami d'université de Sir Jack.
Les Anglais choisissent de louer une maison isolée, près de Villefranche sur mer, dans le « Vallon de la mort » au bord d'une rivière.
Le 27 juillet 1952, les Drummond débarque du ferry-Boat à Dunkerque, leurs amis Marrian, ne sont pas avec eux, il est prévu qu'ils se retrouvent à Villefranche quelques jours plus tard.
Le 28 Juillet, les Drummond dorment a Reims, ils passent ensuite par Domrémy le 29 Juillet, Elisabeth en profite pour envoyer une carte postale à sa grand mère à Londres.
Le 30 Juillet, ils sont à Aix-les-Bains, ils prennent ensuite la route Napoléon, et dorment au Grand hôtel de Digne, sur l'avenue Gassendi.
Le 1er Août, vers 9h30, alors qu'ils s'apprêtent à quitter Digne, Elisabeth qui avait vu une affiche annonçant un spectacle taurin pour le Lundi 4 Août, dit à son père qu'elle veut y assister. Sir Jack qui était en train de payer la note d'hôtel, accepte, et demande à l'employée de l'Hôtel : Mlle Jeanine Roland, comment se procurer des places. Ils se dirigent rue des serres à Digne, et payent les billets à Mr Chauvin.
A ce moment, c'est certain, la famille Drummond improvisent leur retour sur Digne pour le 4 Août 1952 .
Le 1er Août donc, ils prennent la route de la maison de Villefranche, ils y arrivent en fin de journée et mettent au courant les Marrian, de leurs intentions de revenir à Digne pour le 4 Août.
Le Lundi 4 Août 1952, 6h30, les Drummond quittent la villa « des beaux cyprès » à Villefranche, pour Digne. Ils assistent, comme prévu, à la mini
Corrida ( pas de mise à mort, donc charlotta ). 
En fin d'après midi, ils quittent Digne par le Route Napoléon. D'après William Reymond, journaliste, ils se rendent au Restaurant Hôtel de
l'Ermitage, en sortie de Digne pour y boire un verre. Ils repartent ensuite vers Villefranche, sur la route ils s'arrêtent à 165 Mètres de la Grand'terre pour camper. Le lendemain, ils sont morts.
Voici les derniers jours des Drummond, tels que l'enquête de police l'a établi, d'après les témoignages des Restaurateurs, Hôteliers,  et de la
famille Marrian. 
Oui, les Drummond ne savaient pas où ils dormiraient le soir du 4 Août, ils étaient à Lurs et c'était leur destin…tragique.
On sait donc, que si les Drummond se trouvaient à Digne pour la Charlotta du 4 Août, c'est parce que Elisabeth avait demander cette faveur à son père, et cela est confirmer par Mlle Roland et Mr Chauvin. De plus, après le triple meurtre on retrouvera dans les papiers de Jack Drummond, à Nuthall, la note suivante ; en parlant de son voyage en France il dit «  Elisabeth est folle de joie à l'idée du voyage que nous allons faire en France, elle a déjà des tas de projets, des tas d'itinéraires, et un Mois ne suffira pas pour visiter la liste des villes qu'elle a établie ». La conclusion à retenir est donc, que Jack et Ann Drummond faisaient leur parcour de vacances au grés des envies de leur fille, et surtout pas pour rencontrer des agents secrets aux cheveux gras, venus de l'est, en voiture américaine  ( mais ça, ça fait vendre des livres !) ……

Les Drummond, une famille de campeurs ?

On peut en être sûr, non seulement parce que leurs amis, les Marrian, le confirment et l'expliquent, les Drummond pratiquaient quelques fois le camping sauvage et aussi par le fait, que s'étant délester de leurs principales affaires à Villefranche, les Drummond conservaient avec eux, deux lits de camps, une lampe tempête, des livres, et un nécessaire complet de couverts pour manger.

Avant le drame, la famille Anglaise était déjà passée au moins à 3 reprises sur la route RN96, et donc devant la Grand'terre et leur futur lieu de campement: un trajet pour se rendre à Villefranche sur Mer, un autre trajet pour aller à Digne, et ensuite pour rentrer à Villefranche.

L'avaient-ils repérer ?  Avaient-ils vu et choisi l'emplacement sur lequel, dans la nuit fatidique du 4 au 5 Août, ils allaient dormir  ? On peut le croire…

En effet sur cette portion de route, les endroits pour stationner ne sont guère légions, le lieux choisi , près de la Grand'terre, offrira non
seulement un accès à la Durance, grâce au pont qui enjambe la voie de chemin de fer, mais offrira également la possibilité de demander de l'eau en cas de besoin puisque la ferme Dominici n'est pas loin. Et puis, il est toujours plus rassurant de camper près d'une maison, que dans un
environnement complètement isolé.
De plus, les terrains autour du campement sont plutôt entretenus, en effet, Gaston Dominici possédant des chèvres, l'herbe n'est guère haute. 

Déjà à l'époque, ce lieu avait déjà été choisi par bon nombre de campeurs, dont certains avaient été chassés par Gaston Dominici. Il est à noter que la Grand'terre devait d'ailleurs devenir un camping dans les années qui suivirent ou une station service, mais le projet fut abandonner.

Officiellement, l'endroit où les Drummond campaient,  appartenait à la DDE de l'époque, qui y stockait, parfois, des gravillons pour l'entretien de la route. Gaston Dominici considérait quand même que ce bout de terrain, lui appartenait.

Aujourd'hui encore, il arrive que des campeurs choisissent  cet endroit sans connaître bien sûr, l'histoire de ce lieu.

Les Dominici comprennent qu'il s'agit de campeurs, car non seulement Gustave et Gaston passent à plusieurs reprises devant les Drummond, mais de plus, l'enquête établira que les Anglaises sont venues à la ferme se faire connaître en demandant de l'eau ; eau qui leur sera fournie aimablement par Yvette qui ira la puiser dans le puit familial dans la cour.

Les contradictions, les mensonges….

Dès le 8 Août, le Commissaire Sébeille convoque Gustave Dominici en Mairie de Peyruis.
Un détail chiffonne Sébeille, il confronte le chef poseur Roure de la SNCF,.
Gustave affirme que Rourre l'avait conseillé de revenir sur les lieux de l'éboulement, tôt le lendemain matin, avant le passage de la première
micheline.   Roure, n'est pas d'accord avec Gustave, il ne lui a rien demandé, il lui a simplement dit que lui même viendrait, au petit matin.

Face à Roure, Gustave revient sur sa déposition. La suite de cet interrogatoire, le premier qui soit officiel pour Gustave, est éloquente . 

Gustave déclare que lors de la découverte du corps de l'enfant gisant à mis hauteur du talus surplombant la Durance, il ne s'est pas approché du corps, mais l'a regardé du haut du talus.

Il en avait déduit qu'elle était morte, et il pensait alors, que les parents avaient fait le coup…..

Le Commissaire Sébeille stupéfait, lui pose alors cette question : Mais comment seraient partis les parents puisque la voiture était encore là ?
Réponse de Gustave : à pieds….

Les premiers éléments recueillis par Sébeille, démontrent que l'hypothèse d'une participation active de Gustave liée au  meurtre peut être
creusée : 

Gustave découvre l'enfant en faisant un détour illogique pour se rendre sur l'éboulement, sans aucun outil qui lui permettrait d'enlever un peu de terre.
Il dit être monté vers  la route nationale, sans découvrir n'y chercher le corps des parents.
Il interpelle un motocycliste, lui parle de morts, demande les Gendarmes, mais pas de médecin.
Puis il y a cette contradiction avec le Chef poseur Roure.

Pour un premier témoignage, disons le clairement : il est louche !

Le 3 septembre 1952, le Commissaire Sébeille organise une confrontation avec le motocycliste Mr Olivier.
Mr Olivier travaille de nuit à l'usine chimique de Saint Auban, il revenait de son travail quand il aperçut Gustave lui faire de grands signes pour lui faire prendre connaissance du meurtre.
Mais leurs déclarations ne concordent pas sur plusieurs points.
Mr Olivier affirme qu'il a vu Gustave sortir précipitamment de derrière la voiture Hillman des Anglais qui stationnait en bordure de la route.
Il vit Gustave sortir «  comme un diable sort de sa boite » et eut un peu peur sur le moment.
Gustave, encore une fois ne donne pas la même version des faits. Il affirme avoir été plus loin en direction de la Grand'terre à hauteur du chemin qui mène au pont.
Mr Olivier explique que, au moment où il a vu Gustave lui faire signe, il avait dû freiner, et qu'il lui a fallut quelques dizaines de mètres pour stopper sa moto ( un témoin les verra à cet endroit ).

En 2004, la configuration des lieux du crime n'ayant pas tellement changée, je me suis rendu compte sur place que, entre le moment où on
l'entendait un véhicule arriver et le moment où il passait devant le lieu du campement (en venant de Peyruis), il se passait un temps très court, environ 2 à 3 secondes. A cet endroit, en venant de Peyruis, il y a un virage et une petite colline qui cachent les véhicules et le bruit, la surprise est donc totale.

De plus dans sa première déclaration, il explique qu'avant d'arrêter Mr Olivier, il avait hésité à arrêter une moto, mais comme celle-ci n'était pas immatriculée en France, il ne l'avait pas fait. 
Pour quelle raison Gustave se trouvait t'il derrière la voiture, si ce n'était pas pour maquiller les lieux du crime ?

Dans la nuit du 3 septembre 52, Gustave, en garde à vue à la Gendarmerie de Forcalquier, n'en dira pas tellement plus, sauf qu'il avait bifurqué pour déboucher à peu de distance du capot de la voiture, qu'il avait alors vu un lit de camp sur le côté gauche du véhicule et qu'ensuite il vit un autre lit de camp de l'autre côté de la route, les pieds en l'air, mais qu'il n'avait pas eu la curiosité de s'en approcher.

Le 4 septembre 52, le Commissaire reçoit les conclusions de l'expert chargé d'examiner la balle retrouvée sur la voie de chemin de fer, celle qui a causé un impact sur le parapet du pont (côté droit face à la Durance). Le projectile a bien été tiré par la carabine du crime.

Ce point est capital, il prouve que l'enfant a bien fuit vers la Durance et que le meurtrier, n'ayant pas atteint son but, et ayant une balle coincé dans le canon, a dû courir après l'enfant pour la tuer à coups de crosse.

Le 8 Août, le Commissaire Sébeille recueille le témoignage des frères Duc.
Ils sont chauffeurs routier, et se rendaient pendant la nuit du crime à Cavaillon, ils avaient aperçu dans les phares du camion,  la Hillman des Anglais en bordure de route. Ils avaient remarqué à quelques mètres, un homme figé, visiblement surpris comme au garde à vous.
L'homme n'avait pas pu se cacher, surpris par les phares à longue portée du camion.
Les frères Duc donnèrent un signalement qui correspondait un peu a Gustave : 1.80M, plutôt fort, chevelure abondante.  Il était 0h20 à leur passage.


Entrée en scène de Paul Maillet :


Le commissaire Constant remplace Sébeille à Lurs pendant ses vacances qu'il prend dans sa petite maison de Séverac le château.

Constant rend visite à Paul Maillet, cultivateur à Lurs et employé de SNCF.
Il habite dans une petite ferme au lieu dit « La Maréchale » qui se trouve à quelques centaines de mètres de la Grand'terre en Direction de Lurs.

Paul Maillet est le secrétaire de la cellule communiste locale. Il fut suspecté lui aussi au début de l'enquête, pendant une perquisition chez lui ( beaucoup de ferme alentours furent visitées) : on trouva 2 mitraillettes allemandes, de marque Sten, souvenirs de guerre, de résistant.

Paul Maillet , bon marcheur, et des fois braconnier, n'avait rien à se reprocher.
Le Commissaire Constant presse Maillet de questions, et Maillet craque, il livre des informations cruciales.
Il affirme que Gustave Dominici, un de ses amis d'enfance, chez qui il vient souvent, lui a fait une confidence étrange.
Gustave lui a dit, un jour, alors qu'ils étaient dans la cour de la Grand'terre, qu'il avait vu bouger la petite Elisabeth lors de sa découverte.
Un confrontation a lieu entre les deux hommes. Devant Constant, Gustave avoue avoir effectivement dit ça, il ne mesure pas la portée de ce qu'il vient d'avouer.
Il sera condamné à Digne en première instance, à deux mois de prison ferme pour non assistance à personne en danger,  la cour d'Aix en Provence confirme la condamnation. Gustave a répété devant les juges ce qu'il avait vu le matin du crime : j'ai vu l'enfant bouger un bras, et gémir,  elle faisait « ronron »…explique t'il. A ce moment là , Gustave ne subit aucune pression de la part de la police,  il est défendu par des avocats, et les deux procès sont distants de plusieurs semaines. On peut penser qu'au moins à ce moment là , Gustave dit la vérité.

Le fait que Gustave explique qu'il a vu l'enfant gémir et bouger un bras est lourd de conséquences pour la famille Dominici.

Les rapport des légistes ( tenus secret à ce moment ) est formel, l'enfant n'a pas pu survivre plus d'une heure à ses terribles blessures, le crâne a été défoncé de plusieurs coups de crosse. Les coups de feux étant tirés à 1h10 du matin, que faisait Gustave sur les lieux du crime ? A t'il était prévenu ? A t'il participé au meurtre ? Est il le meurtrier ?

Gustave sort de prison le 15 décembre 1952, on fête son retour triomphalement à la Grand'terre, tout le monde est là pour accueillir le tave.

Gaston n'est pas venu voir Gustave en prison, « il s'en foutait pas mal » explique Gustave.
Yvette Dominici est parti habiter chez ses parents, les époux Barth à quelques kilomètres de là, sur la route de Forcalquier.
Yvette explique à ses parents «  j'avais trop peur de rester seule avec les vieux ».

Mais après sa sortie de prison les ennuis de Gustave, et de la famille Dominici, ne sont pas terminés pour autant.

De novembre à décembre 52, le Commissaire Sébeille ne vient pas souvent à Lurs, beaucoup croient que l'affaire est enterrée.

Mais Sébeille épluche avec ses hommes tous les procès verbaux accumulés depuis le début de l'affaire, et essaie de mettre à jour les contradictions, les mensonges.
Le 27 Janvier 53, le Commissaire Sébeille se rend chez Paul Maillet.
Maillet explique à Sébeille qu'il n'avait pas parlé plus tôt, parce que Gustave était son ami, et il pensait qu'il parlerait lui même. Comme ce ne fut pas le cas, Maillet expliqua à Sébeille qu' un jour du mois de Septembre 52, en allant chercher des pommes de terre à la Grand'terre, Gustave lui avait dit en parlant du crime : « si tu avais vu, si tu avais entendu ces cris d'horreur ».
Maillet lui demanda où il se trouvait à ce moment là , il répondit : « la devant, dans la luzerne ».
Paul Maillet fut victime d'intimidations, à de multiples reprises par la suite de ses déclarations. Une fois, on tendit un fil de fer sur son chemin, et il tomba de moto, une autre fois, en pleine nuit il entendit des inconnus dans la cour de sa ferme, une autre, le vieux Gaston avait fait mine de le mettre en joue avec sa canne et faisait le geste d'appuyer sur une gâchette.
Jusqu'à sa mort, en 2004, Paul Maillet fournira exactement la même version des faits.

Un morceau de crosse….

Gaston avait expliqué à la police, le premier jour de l'enquête que c'était lui qui avait trouvé le morceau de crosse derrière la tête de l'enfant, à environ 10cm, et qu'il l'avait remis à la gendarmerie. Il disait l'avoir découvert a 9h.
Mais Sébeille décida d'entendre les personnes qui avaient enlevé les corps des Anglais dans l'après midi du 5 Août. Il s'agissait de 3 personnes travaillant comme employés municipaux à Forcalquier. Ils déclarèrent avoir trouvé le morceau de crosse au moment de l'enlèvement des corps, pour eux, Gaston Dominici se trouvait loin à ce moment là (étrangement  il n'est pas présent sur les photos de l'enlèvement des corps…).
Un membre de la famille Dominici avait encore menti, et cette fois ci c'était Gaston. Mais pourquoi avoir menti à ce sujet ? Forcément pour
lever les doutes sur sa personne, le meurtrier ne pouvait avoir donné le morceau de crosse, à la gendarmerie !
Le 7 mai 1953, le Commissaire Sébeille entendit Roger Perrin, un des petits fils de Gaston.
Roger Perrin, qui s'embrouilla dans ses explications, dit avoir dormi la nuit du crime, dans la ferme de ses parents, à quelques kilomètres de la Grand'terre. Il expliqua à Sébeille que les Anglaises étaient venues à la Grand'terre, en fin d'après midi pour y prendre de l'eau, que Miss Drummond ne parlait pas Français, et que sa fille Elisabeth lui traduisait ce que lui disait Yvette Dominici, car c'est elle qui les a reçu avec Gaston qui venait de rentrer ses chèvres, il les montra d'ailleurs à Elisabeth puis, il fit visiter son étable.
C'est Yvette qui avait raconté cela, et Gaston le lui avait confirmé, le matin du crime. 
Germaine Perrin, confirma le lendemain les dires de son fils,  elle avait elle aussi entendu la même chose, et elle rapporta que Yvette Dominici lui avait rajouté sans trop savoir ce que ça voulait dire « la prochaine fois, on ne rendra service à personne…. ». Les Marrian, amis des Drummond, avaient, pendant leurs dépositions, expliqué que Miss Ann Drummond, ne parlait pas un seul mot de Français, mais que leur enfant Elisabeth se débrouillait plutôt bien. Qui pouvait être au courant de ce détail, sauf quelqu'un qui était rentré en contact avec eux.

Les révélations de Roger et Germaine Perrin sont importantes. Elles attestent que les Anglaises connaissaient le visage de Gaston, on peut comprendre à ce moment que l'enfant ait fuit vers la Durance, plutôt que vers la Grand'terre, ce qui aurait été plus logique, car elle aurait dû lui offrir le salut. Elisabeth a t'elle reconnu son agresseur ? C'est une fois de plus, fort probable.

Un nouveau témoin :

En haut du plateau de Ganagobie, non loin de la Grand'terre,  le Commissaire Sébeille fait la connaissance d'un témoin capital : Mr Ricard.

Mr Ricard travaille à la Sécurité Sociale de Marseille, il est lui aussi un adepte du camping.
Au début du Mois d'Août 52, il avait établi son campement sur le plateau.
Le matin du 5 Août 1952, terminant ses vacances, il se dirigeait à pieds sur la route nationale 96 en direction de l'arrêt de car pour Forcalquier.
Il était 7h du matin, quand il arriva à hauteur du campement des Drummond. Il observa une scène étrange. Il avait remarqué l'Hillman et les objets éparpillés sur le sol, il devina un corps derrière la voiture, sous une couverture, à côté d'un lit de camp. Il crut que la campeuse était endormie, et il se dit, que les gens n'étaient pas très soigneux.
Il continua sa route, le car arriva, il monta dedans.

Visiblement, le témoignage de Mr Ricard n'apporte rien à l'enquête. Mais le Commissaire Sébeille eut l'idée de lui faire voir une photo de
l'emplacement du corps de Ann Drummond, prise sur les lieux du crime.
Mr Ricard très calme sursauta alors: « Le corps était parallèle à la voiture et couché sur le dos, sur la photo que vous me faites voir, il est perpendiculaire à la voiture, sur le ventre et à 10 mètres de l'emplacement ou je l'ai vu », expliqua t'il.

Le corps de Ann Drummond avait donc été déplacé entre 7H00 et  7H30, heure d'arrivée des Gendarmes D'Oraison.
Ce fait extrêmement troublant, prouvait que quelqu'un avait déplacé son cadavre 6H après le drame.
Mais qui était sur les lieux du crime a 7h00 ? :    Gustave Dominici.
( Gaston à 7h00 était loin, il promenait ses chèvres vers Giropey- la Brillanne ) .
Le motocycliste Olivier était parti depuis plus d'une heure vers Oraison, le seul homme sur place, au courant du drame, c'est Gustave.

Le Commissaire Sébeille décida de réentendre Faustin Rourre, le chef poseur de la SNCF.

Il expliqua qu'il vit le corps d'Ann Drummond sur le dos, à 6h35, et qu'il était entièrement recouvert d'une couverture. Le corps était parallèle à la voiture Hillman, les pieds en direction de la ferme Dominici.  Bien plus tard, Clovis Dominici confirma les faits.

Mr Olivier, le motocycliste, est également réentendu dans la foulée, il n'avait pas tout dit, il rajouta à sa déposition, que, quand il a reprit la route suite à l'intervention de Gustave, il avait aperçu contre le mur de la Grand'terre Yvette et Marie Dominici, qui regardaient en direction du Campement et semblaient faire le gué.

C'est avec ces éléments, tenus secrets, que le Commissaire Sébeille prépare son offensive. Elle aura lieu le 12 Novembre 1953, il mettra face à face, ces témoins, et Gustave.

L'offensive de Sébeille:

L'offensive de Sébeille, c'est aussi celle du juge d'instruction Mr Péries.
Le juge soutien le Commissaire, et prépare avec lui, la riposte.
Matin du Jeudi 12 Novembre 53, la Gendarmerie coupe la Grand'terre du monde.
La route est fermée sur la RN96 à hauteur de Lurs et de Peyruis, tous les accès, même en montagne sont sous surveillance.
Un policier sort une voiture d'un garage de Peyruis, c'est la Hillman des Anglais, elle était stationnée là depuis le 5 Août 52.
La police remet en place, sur les lieux de la tuerie, à 150 mètres de la Grand'terre, le véhicule ainsi que tous les objets qui étaient éparpillés sur le sol au moment de la découverte.
Il est 6h00 du matin, 2 policiers frappent à la porte de la Grand'terre, leur mission : empêcher les Dominici de communiquer entre eux.

Sébeille, demande alors aux témoins, pris séparément, Mr Rourre et Mr Ricard, de désigner l'endroit où ils ont vu la forme allongée sous la couverture, parallèle à la voiture. Des photos sont prises.

Clovis Dominici, amené sur les lieux, donne, après quelques hésitations, le même endroit
( il était arrivé presque en même temps que Rourre sur les lieux du crime ).

On amène Gustave de la Grand'terre. Sébeille le place devant la Hillman.

Sébeille lui demande de refaire le même trajet qu'il a pris au matin du 5 Août 52 pour se rendre à l'éboulement. Gustave fait le trajet, le juge l'observe.
Maintenant, il doit montrer comment était le corps de Ann drummond au moment où il l'a découvert.
Devant le Juge d'instruction, Sébeille pose la question : où était le corps de l'Anglaise ?

Gustave prend une couverture et la dispose perpendiculairement au véhicule, au bord du ravin.
-A ce moment, il fait la preuve qu'il a  déplacé le corps. 


Quelques minutes plus tard, le motocycliste Olivier débouche de derrière le virage qui vient de Peyruis. Sébeille demande à Gustave de lui faire voir, l'emplacement où il se trouvait pour prévenir le motard.
Gustave et Mr Olivier ne sont pas d'accord sur cet emplacement.
La route est rendue à la circulation.

Gustave est amené au palais de Justice de Digne pour interrogatoire.
Le Commissaire Sébeille a choisi cet endroit pour l'interroger et éviter que l'on accuse la police de l'avoir frappé. L'interrogatoire aura lieu dans la bibliothèque du palais.

Maintenant, toute la presse est prévenue de ce rebondissement que personne n'attendait, sauf peut être le journaliste Mr Domenech qui avait pu savoir, en rencontrant Sébeille dans un café de Digne, que l'enquête allait redémarrée.

Pendant les premières heures de l'interrogatoire, Gustave nie tout. Il est évasif dans ses réponses, et attend plusieurs minutes avant même de répondre à des questions pourtant simples.
Paul Maillet est amené dans la pièce. Gustave ignore encore que Paul, son ami, a parlé.
Maillet redonne sa version des faits, Gustave nie, puis avoue que oui…. Il a entendu des cris pendant quelques secondes….

Élément encore une fois important, si Gustave a entendu des cris, pourquoi n'a t'il pas bougé et attendu plusieurs heures avant de se lever ?

Il est ensuite confronté à Roger Perrin, il continue à nier ce qu'avance le petit Roger « zézé ».

Plusieurs heures passent.
Le commissaire Sébeille avance pas à pas dans la vérité.
C'est la nuit, Gustave se repose, mais ne dort pas.

Vendredi 13 Novembre 1953 :

Gustave est questionné toute la matinée, mais ce n'est que dans l'après midi qu'il craquera.
Gustave n'en peut plus, il est à bout, et appuie son front contre l'épaule de Sébeille, il pleure, Sébeille attend, sans rien dire, puis, une phrase sort de sa bouche :

« C'est mon père qui a fait le coup… »

Sébeille prend une décision sûrement dommageable, il prend quelques lignes de procès verbal et cesse l'interrogatoire, pour confier Gustave au Juge d'instruction Péries.
Le PV d'un interrogatoire de Gustave se trouve en intégralité dans la partie « Dominici avoue ».
Gustave Dominici  réitèrera  ses aveux à de multiples reprises ( 9 fois ), pendant plusieurs semaines , et devant témoins ( policiers, Juge, greffier, concierge du palais et témoins ).

La partie ne fait que commencer……..

En venant de Peyruis, le bruit de la Moto de Mr Olivier, était masqué par ce virage et la montagne.  Au débouché de celui-ci, cent mètres après, à gauche, c'est le campement des Drummond.

Gustave a été surpris par l'arrivée de la moto, il ne l'avait pas entendu
arriver.